Le Figaro | 05/12/2011 à 16:11
L’OCDE alerte les gouvernements sur l’urgence sociale face à la crise. Il faut investir en priorité sur les politiques d’éducation et d’emploi.
Les écarts n’ont cessé, depuis vingt ans, de se creuser entre les riches et les pauvres. Ainsi, le revenu moyen des 10% les plus aisés représente aujourd’hui neuf fois celui des 10% les plus bas, contre sept au milieu des années 1980, alerte l’OCDE dans un rapport sur l’inégalité. Le fossé reste très élevé aux États-Unis -de 14 à 1- ainsi qu’en Israël et en Turquie. Plus alarmant, la situation s’est aggravée dans des pays traditionnellement égalitaires comme le Danemark, la Suède et l’Allemagne, où le rapport est passé de 5 à 6.
En France, si la situation est restée relativement stable depuis vingt ans, l’OCDE constate une lente détérioration depuis dix ans. En 2008, les 10% des Français les plus riches gagnaient environ 61.000 euros, soit sept fois plus que les 8700 euros de la tranche basse. À noter que la redistribution via les prestations sociales et les impôts réduit l’écart d’un peu plus de 30%, contre 25% dans la moyenne de l’OCDE.
Deux facteurs influent négativement ces dernières années: «une forte augmentation des revenus des très riches -les 0,1%, voire les 0,01%, et une politique redistributive un peu moins efficace, même si elle reste plus favorable que dans beaucoup d’autres pays de l’OCDE», commente Michael Förster, économiste à la direction de l’emploi de l’Organisation.
Un contexte de crise qui appelle des actions rapides
Les records d’inégalité reviennent toujours aux pays émergents. Mais la forte croissance de ces dernières années a permis de limiter ces disparités, notamment au Mexique et au Chili avec un rapport de 1 à 25. Des progrès notables sont également à souligner au Brésil, malgré un ratio à plus de 50.
Globalement, dans les pays de l’OCDE, le fossé s’explique par les inégalités croissantes de salaire et de revenus du travail. Sachant que les progrès technologiques et la mondialisation ont profité en priorité aux travailleurs très qualifiés, cadres dirigeants, CEO… Le cas emblématique étant le secteur de la finance, où les rémunérations et bonus ont fait des bonds substantiels.
Si les marchés du travail plus flexibles ont contribué à des gains de productivité et à augmenter le nombre d’emplois, en particulier parmi les femmes, la progression du temps partiel et des emplois peu rémunérés a creusé l’écart de salaire. Et l’effet positif des dispositifs fiscaux et de protection sociale a moins joué.
Le secrétaire général, Angel Gurria, a tiré la sonnette d’alarme, parlant d’urgence «sociale» dans un contexte de crise, de «nouvelle situation» qui appelle des actions rapides. Les États peuvent user de l’arme fiscale, en visant les très hauts revenus, en combattant plus fermement l’évasion fiscale, et axer les politiques sociales sur l’investissement et les familles, moins sur les retraités, plus sur les actifs.
«La seule solution, c’est l’emploi, a insisté le secrétaire général.Améliorer la qualification est l’instrument le plus puissant. Il faut investir dans l’éducation, dès la prime enfance, et tout au long de la carrière».
Article original sur le site du Figaro.