Le Figaro | Par Anne Cheyvialle | Publié
L’organisation internationale insiste sur le lien entre mobilité entre générations et croissance économique.
Quel est le poids de l’environnement familial et social sur la réussite des enfants ? La question de «l’ascenseur social» mérite l’attention et se pose avec encore plus d’acuité en période de crise économique. Dans une étude publiée cette semaine portant sur l’ensemble des pays de l’OCDE, l’Organisation pour la coopération et le développement économiques souligne le lien existant entre la mobilité entre générations et le développement économique. «L’absence d’égalité des chances joue sur la motivation, ce qui influe sur la productivité et au bout du compte peut peser sur la croissance», précise l’OCDE.
Première conclusion : il existe un lien direct dans la quasi-totalité des pays entre le milieu socio-économique et les résultats des enfants, en termes d’éducation et de salaire. Une fois encore, l’Europe du Nord, qui est souvent citée en exemple pour ses avancées sociales, témoigne de la plus grande mobilité.
Rôle clé de l’éducation
À l’inverse, l’ascenseur social fonctionne moins bien dans les pays anglo-saxons. Le rêve américain ne serait-il plus qu’un mythe ? «99 % des études parlent de l’immobilisme des États-Unis», indique Orsetta Causa, l’un des auteurs du rapport OCDE. Le rapport entre le salaire du père et celui du fils reste en effet très persistant en Grande-Bretagne, aux États-Unis, en Irlande et dans les pays d’Europe méridionale. «Aux États-Unis,c’est encore plus vrai dans le haut et le bas de l’échelle sociale», précise Orsetta Causa. Dans ces pays, l’avantage salarial dépasse les 20 %. Autrement dit, une personne qui a grandi dans une famille instruite peut gagner en moyenne 20 % de plus que si elle vient d’un milieu au niveau d’instruction moyen.
Au contraire, c’est au Danemark, en Norvège, au Canada et en Australie, que le salaire des parents influe le moins. La France occupe une position intermédiaire : plus égalitaire sur le plan salarial, elle l’est beaucoup moins en termes d’éducation. Comme le confirme encore l’étude, l’éducation constitue un facteur déterminant d’ascension sociale. «Il n’y a pas que le milieu familial qui compte, mais aussi le milieu scolaire, c’est-à-dire l’origine socio-économique des autres élèves. Les enfants sont sensibles aux résultats de leurs camarades», relève Orsetta Causa, qui souligne le manque de mixité sociale des écoles françaises.
Résultat, c’est en France et aux États-Unis que la réussite sociale du père influe le plus sur la performance des enfants dans l’enseignement secondaire. Des inégalités qui se traduisent ensuite dans les études secondaires et se retrouvent dans les salaires.
Au-delà du constat, l’OCDE s’intéresse au rôle des politiques publiques. De quelle manière peuvent-elles contribuer à plus de mobilité ? «En misant sur l’éducation dès la petite enfance, qui s’avère très importante pour les enfants de familles défavorisées», suggère Orsetta Causa.
Concrètement, cela signifie plus de crèches et d’écoles maternelles. Il ressort par ailleurs qu’une sélection précoce dans l’enseignement secondaire, à 10 ans comme c’est le cas en Allemagne et en Autriche, ne favorise pas la mobilité entre les générations. En revanche, des politiques redistributives et des systèmes sociaux plus généraux peuvent y contribuer.
Article original sur le site du Figaro.