Christine Lejoux | 11/10/2013, 03:50 – 753 mots
L’Autorité des marchés financiers (AMF) a publié son rapport 2013 sur le gouvernement d’entreprise et la rémunération des dirigeants des sociétés cotées. Le gendarme de la Bourse salue la féminisation et l’internationalisation des conseils d’administration, mais souhaite des précisions sur la notion d’administrateur indépendant.
Stigmatiser les mauvais élèves peut avoir des vertus. Et pas seulement à l’école. En 2012, dans son rapport annuel sur le gouvernement d’entreprise et la rémunération des dirigeants des sociétés cotées, l’Autorité des marchés financiers (AMF) avait, pour la première fois, donné les noms des entreprises les moins vertueuses en la matière.
Un an plus tard, le gendarme de la Bourse constate dans son rapport 2013, publié le 10 octobre, une « amélioration générale des pratiques de gouvernance et de rémunération », sur la base des documents de référence 2012 des sociétés et de l’ancien code Afep-Medef, en vigueur jusqu’à juin 2013. « Cet aperçu nominatif de la gouvernance des sociétés cotées a sans doute contribué à la propagation des bonnes pratiques », sourit Benoît de Juvigny, secrétaire général de l’AMF.
Dans plus de 60% des entreprises, président et DG sont une seule et même personne
Ainsi, le gendarme des marchés financiers salue « une nette augmentation » des sociétés ayant nommé un administrateur référent. Sur les 60 plus grands groupes cotés à la Bourse de Paris, 18,4% disposent aujourd’hui de cette sorte de « super administrateur en chef », à même, par exemple, de réunir le conseil d’administration en vue de remplacer le PDG, s’il juge que ce dernier n’est pas à la hauteur de sa tâche. En 2010, 9% seulement des entreprises comptaient un administrateur référent.
« Le modèle moniste, qui consiste à unifier les fonctions de président et de directeur général, est de nouveau en croissance, en France, puisqu’il concerne plus de 60% des sociétés, contre 50% environ en 2011. Or, pour faire contrepoids au PDG, les entreprises ont recours à un administrateur référent », explique Benoît de Juvigny.
La part des administrateurs indépendants dans les conseils est de 55%
De la même façon, l’AMF se réjouit de la féminisation et de l’internationalisation des conseils d’administration, où l’on trouve aujourd’hui en moyenne un quart de femmes et un quart d’étrangers, contre des proportions respectives de 10% et de 20% il y a trois ans. Toujours au chapitre des conseils d’administration, le gendarme de la Bourse salue le maintien « à un niveau élevé » (55%) de la part des administrateurs indépendants. Le groupe de BTP Colas fait ainsi figure d’exception, en ne qualifiant aucun des membres de son conseil d’indépendant.
Mais qu’entendent exactement les sociétés par « indépendant » ? Pas entièrement convaincue que leur acception du mot soit la même que la sienne, l’AMF « invite les sociétés à se montrer plus transparentes » en la matière. « Des banquiers d’affaires qualifiés d’indépendants se trouvent dans certains conseils d’administration », s’étonne Benoît de Juvigny.
La rémunération due aux dirigeants, au titre de 2012, s’élève à 1,9 million, en moyenne
Autre domaine où les sociétés cotées ont encore des progrès à faire : le non-cumul des mandats. Moins de la moitié (48%) des dirigeants mandataires sociaux se contentent de leur fonction exécutive. Ils sont encore 18% à exercer au moins trois mandats, et 10% à en avoir au moins quatre. Avec une mention spéciale à Vincent Bolloré, PDG du groupe éponyme, qui cumule neuf mandats. Or le nouveau code Afep-Medef, publié en juin dernier, n’autorise plus que deux mandats extérieurs à l’entreprise, contre quatre auparavant.
Quid du sujet souvent très polémique des rémunérations des dirigeants des sociétés cotées ? Au titre de l’exercice 2012, les rémunérations globales (comprenant le salaire fixe, la part variable, les bonus exceptionnels, les jetons de présence et les avantages en nature) dues aux 68 PDG, directeurs généraux, présidents de directoire et gérants des 60 sociétés étudiées par l’AMF s’élèvent à quelque 131 millions d’euros, au total. Soit une moyenne de 1,9 million d’euros environ par dirigent, un montant qui recouvre d’importantes disparités, les rémunérations s’échelonnant entre 200.000 euros et…4,8 millions d’euros.
8 sociétés ne disent pas si la rémunération variable de leurs dirigeants est plafonnée
« Dans une large mesure, les rémunérations variables respectent le code Afep-Medef, qui recommande un équilibre entre la part fixe et la part variable, laquelle doit être indexée sur des critères qualitatifs et quantitatifs objectifs », estime Martine Charbonnier, secrétaire générale adjointe de l’AMF. Seul bémol, huit sociétés – Colas, Euler-Hermes, Eutelsat, Financière de l’Odet (qui détient 79,8% de Bolloré), Havas, Lagardère, Métropole TV (M6) et Plastic Omnium – se sont bien gardées de préciser si les rémunérations variables de leur état-major étaient plafonnées, contrairement à ce que recommande le code Afep-Medef.
Enfin, toujours au chapitre des émoluments, trois sociétés – Accor, Eurazeo et Remy Cointreau – ne soumettent pas la totalité des options ou des actions gratuites attribuées à leurs dirigeants à des conditions de performance. Or ces options et actions gratuites ont représenté pas moins de 30% de la rémunération globale des dirigeants, en moyenne, l’an dernier.