Définitions statistiques de la richesse | La Croix et Terra Eco

• Extraits de « 8 millions de pauvres, à qui le tour ? », Terra Eco, jeudi 26 janvier 2012 :
Le calcul de la pauvreté se base sur le niveau de vie médian, qui coupe la population française en deux parts égales. La moitié gagne moins que ce seuil, l’autre plus. Jusqu’en 2006, l’Insee, l’Institut national de la statistique et des études économiques, estimait que l’on est pauvre si l’on gagne moins de 50 % de ce revenu médian, soit 795 euros en 2009. Aujourd’hui, elle utilise le seuil de 60 %, qui est la référence européenne, soit 954 euros en 2009.

Article intégral : 8 millions de pauvres, à qui le tour | Terra Eco

• Extraits de « Être riche, c’est qui, c’est quoi », La Croix , 14 juin 2010 :
Au tournant du 20e siècle, Vilfredo Pareto s’interrogeait : pas plus que la vieillesse, on ne sait où commence la richesse. Cent ans plus tard, cerner le « sentiment » de richesse se heurte au même problème. Le seuil de la pauvreté, donnée statistique définie, est sans équivalent à l’autre bout de l’échelle sociale.
Les personnes considérées comme « riches », « très haut revenus » selon la terminologie de l’Insee, ne représentent que 1 % de la population française : un revenu annuel déclaré supérieur à 84 500 euros. L’Insee compte une unité de consommation (UC) pour le premier adulte d’un ménage, 0,5 UC pour les autres personnes de 14 ans et plus, et 0,3 UC pour les enfants de moins de 14 ans. Juste en dessous, et toujours selon l’Insee, les « hauts revenus » se situent entre 35 600 euros et 84 500 euros, soit 9 % de la population. Au sein du 1 % des très hauts revenus, les disparités sont colossales : de 1 à 150, soit de 84 500 euros à plus de 13 millions d’euros.
Selon Monique Pinçon-Charlot, « il existe plus de diversité dans les conditions de vie des riches que dans celles des pauvres. La grande richesse est extrêmement dispersée, d’autant qu’elle est multidimensionnelle. Car, à côté de la richesse économique et patrimoniale, il ne faut surtout pas méconnaître l’importance de la richesse sociale, c’est-à-dire l’entretien des réseaux, essentiel dans ces univers-là, et de la richesse culturelle. Cette dispersion explique que même chez les plus aisés peut s’imposer l’idée que les riches, c’est les autres. La perception de la richesse est de toute façon variable et dépend de ce que chaque individu peut imaginer en fonction de sa position dans la société. »
En 2009, une enquête du CREDOC sur les classes moyennes abordait de façon marginale cette notion de perception de la stratification sociale. À partir de quel montant de ressources se sent-on riche ? Réponse des Français : en moyenne 4 660 euros par mois pour une personne. Des revenus que n’atteint que 3 % de la population.
En dessous, on pourrait « légitimement » ne pas se sentir riche : « 50 % des Français les plus aisés disent appartenir aux classes moyennes supérieures, et 29 % même aux classes moyennes inférieures, précise Régis Bigot, directeur du département conditions de vie et aspirations des Français au Crédoc. Cette difficulté à se concevoir privilégié vient d’une représentation biaisée aujourd’hui de la répartition des revenus, issue de la période assez atypique des Trente Glorieuses, qui gonflait des classes moyennes croyant à l’ascension sociale. Aujourd’hui, ces classes moyennes stagnent, et le fossé avec les hauts revenus, eux en forte progression, se creuse. »
Du coup, la frange basse des hauts revenus ne peut-elle être considérée comme « riche » ? C’est bien sûr loin d’être admis par la population concernée. « Tant que l’on parle de taxer les super-riches, tout va bien, commente Louis Maurin, cofondateur de l’Observatoire des inégalités. Mais dès que l’on propose de situer le seuil de richesse à un niveau plus raisonnable, pour penser une fiscalité compatible avec l’ampleur de l’effort national indispensable pour financer la dette, les retraites ou la Sécurité sociale, ça coince. Pourtant, lorsqu’on appartient au 9 % des Français avec des hauts revenus définis par l’Insee, si on n’est pas riche, alors qu’est-ce qu’on est ? »
Pour l’économiste Thomas Piketty, l’enjeu majeur de ce débat réside aussi dans ce qu’il appelle le « grand retour de l’héritage ». La définition de la richesse exigerait de plus en plus de prendre en compte le patrimoine constitué et transmis et, de ne pas considérer seulement l’accumulation des biens des super-riches.
« Des dotations de 300 000 ou 400 000 euros n’arrivent certes pas tous les jours, mais ne se produisent pas non plus que chez les plus nantis, assure l’économiste. Une fraction non négligeable d’une génération post-baby boom s’apprête à en profiter, et des inégalités redoutables pour une société démocratique vont se constituer. Il faut impérativement prendre en compte cette dimension, qui dépasse le débat sur la nécessité de faire payer les riches. »
Une analyse avec laquelle Monique Pinçon-Charlot n’est qu’en partie d’accord : « La richesse patrimoniale est effectivement essentielle à prendre en compte. Mais d’abord et avant tout, celle des très hauts revenus qui aujourd’hui ne laisse rien au hasard dans sa transmission, agissant comme la seule classe vraiment organisée dans notre société. On peut certes réfléchir à une fiscalité contributive concernant les hauts revenus définis plus largement. Mais je crois qu’il existe bien des marges de manœuvre à exploiter avec les très hauts revenus qui concentrent les niches fiscales choisies, l’accès aux paradis fiscaux et les revenus du capital peu taxés. Si une prise de conscience peut intervenir, j’espère avec optimisme qu’elle touche aussi des familles très aisées qui se réclament encore de certaines valeurs, et qui commencent à percevoir que ce monde est fou. »

Article intégral : Être riche, c’est qui, c’est quoi | La Croix
(raccourci dans Le riche, c’est pas moi c’est l’autre | Slate)